Qu’est ce qui est épique ? N’en déplaise aux linguistes et autres férus de la précision lexicale, mais je n’aurais pas l’outrecuidance de définir grammaticalement cet adjectif, à ne pas confondre toutefois amis ornais, avec un autre adjectif phonétiquement proche mais bien loin du sens du premier.
Entendez moi bien, il est évident que la charge des Rohirims devant les portes de Minas Tirith peut être à la fois épique et hippique, ou que la victoire d’un trotteur né à Nonant le Pin au Grand Prix d’Amérique puisse être aussi hippique qu’épique, mais c’est bien sur la notion de l’héroïsme, de la bravoure et de grandeur d’une épopée que je souhaite m’attarder, et non sur la qualité relative des lasagnes surgelés.
Comment être épique ?
Pourquoi donc s’attacher maintenant à parler de la valeur d’une épopée ? Mais quel autre moment que celui-ci, alors que la deuxième trilogie de Peter Jackson sur la Terre du Milieu vient de s’achever ?
Il est incontestable que le Seigneur des Anneaux, que ce soit sa version littéraire ou cinématographique nous a fait vibrer. L’escarmouche au Mont Venteux, la Bataille de la Moria, celle du Gouffre de Helm, la défense de Minas Tirith, la bataille de la Porte Noire et j’en passe… Autant de moments clés que le spectateur se rappelle avec émotion, vibrant encore sous les injonctions des héros, se remémorant les tirades cultes de Gandalf : « Vous ne passerez pas ! Fuyez pauvre fous », ou de Théoden : « En avant ! Ne craignez aucune obscurité. Debout ! Debout, cavaliers de Théoden ! Les lances seront secouées, les boucliers voleront en éclats ! Une journée de l’épée…une journée rouge avant que le soleil ne se lève ! »…
Voila ce qui est épique. Alors la trilogique du Hobbit l’est elle aussi ? Au sens de l’épopée sans doute. Mais trouve-t-on des moments de bravoure digne de la chute de Boromir sauvant tentant de sauver Merry et Pippin des Uruks ? Brisant son cor à force d’appel au secours tel Roland fidèle d’entre les fidèles de l’empereur des francs ? La reconquête de la montagne solitaire ou la chute de Smaug mérite-t-elle une chanson telle que Peter Jackson nous le met en image ?
Epique … oui mais …
La bataille des cinq armées… On s’attend à du grandiose, au choc brutal des troupes des Nains, des Elfes et des Hommes contre celui des orques et des Gobelins. On s’attend au réveil de la cruauté, on s’attend à entendre résonner le cor, on s’attend au courroux et à la ruine… On a envie de voir déferler des hordes de Nains caparaçonnés du haut de la montagne solitaire, à voir des Elfes sacrifier leur immortelle vie au bénéfice d’un mince espoir pour les hommes, on veut du suspens, une bataille promise comme la plus longue de l’histoire du cinéma qui tienne la dragée haute à tout ce qui a pu se faire d’héroïque jusqu’à présent.
Malheureusement et même si le film est beau, même si l’on ne s’ennuie pas, il manque un petit quelque chose. Il manque cette dose de courage et de fragilité qui fait des héros ce qu’ils sont. Legolas est trop fort, Thorin ne fait qu’une bouchée d’une centaine de gobelin, et Bilbon ne semble pas pris au dépourvu face à des orques dont l’armure semble si lourde que les Uruk Hai passerait pour des danseuses étoiles.
Le travail est fait, plutôt bien, mais il manque le frisson. Il manque ces plans de caméra ou l’espoir surgit à l’horizon, avant de déferler en un hennissement vengeur sur des hordes d’ennemi, les sabots martelant le sol tel le tonnerre inarrêtable de nos souvenirs d’enfance, au chaud sous la couette, un grand livre à la main… Hippique je vous dis 😉 !